En Afrique, la diplomatie à bas bruit des Etats-Unis

La rédaction
18:3026/01/2024, Cuma
AFP
Un technicien répare un microphone pendant qu'Antony Blinken, le secrétaire d'État américain, tient une conférence de presse au ministère des Affaires étrangères à Luanda le 25 janvier 2024.
Crédit Photo : ANDREW CABALLERO-REYNOLDS / AFP
Un technicien répare un microphone pendant qu'Antony Blinken, le secrétaire d'État américain, tient une conférence de presse au ministère des Affaires étrangères à Luanda le 25 janvier 2024.

Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a renouvelé cette semaine l'engagement de long terme des Etats-Unis en Afrique, un continent où la Russie et la Chine étendent leur influence et où il a dû composer avec le soutien de son pays à Israël dans la guerre contre le Hamas.

M. Blinken s'est rendu dans quatre pays africains de la façade atlantique où les gouvernements sont issus d'élections au suffrage universel (le Cap-Vert, la Côte d'Ivoire, le Nigeria et l'Angola), alors que la région a connu depuis 2020 une série de coups d'Etat militaires.


Face à ses interlocuteurs, qui n'ont pas manqué de lui rappeler la promesse non tenue du président Joe Biden d'une tournée africaine en 2023, M. Blinken a adopté une approche empreinte de pragmatisme et de proximité.


A Abidjan, l'amateur de
"soccer"
a assisté à une rencontre de la Coupe d'Afrique des Nations, où les dirigeants ivoiriens, hôtes de la compétition, lui ont remis le maillot orange de la sélection des
"Eléphants"
floqué à son nom.

Au Nigeria, géant continental aux quelque 220 millions d'habitants, Blinken est sorti des salles de réunions de la capitale Abuja pour aller à la rencontre de jeunes informaticiens du foisonnant secteur de la tech dans la mégapole Lagos. Le discours a également changé.

Lors de son dernier voyage en Afrique en mars 2023, M. Blinken s'était rendu au Niger pour soutenir le président élu Mohamed Bazoum. Quatre mois plus tard, M. Bazoum était renversé par un coup d'Etat militaire et le nouveau régime cherche désormais à renforcer ses liens avec Moscou.


Cette semaine, M. Blinken a plaidé pour une vision plus
"globale"
de la lutte contre les groupes terroristes qui ensanglantent le Sahel, davantage centrée sur le développement des communautés locales, au-delà de la seule réponse militaire.

"Sur la défensive"


Il a ainsi loué les efforts de la Côte d'Ivoire qui a pour l'heure réussi à endiguer la menace terroriste en mêlant une approche sécuritaire et de développement économique, alors que ses voisins du Nord, Burkina Faso et Mali, sont le théâtre d'attaques incessantes de terroriste affilés à Al-Qaïda ou au groupe Daesh.


Mais le discours de la diplomatie américaine sur un continent déjà échaudé par les milliards de dollars dépensés pour le soutien à l'Ukraine contre l'invasion russe, au détriment selon certains de l'aide au développement, peine à se faire entendre en raison du ferme soutien de Washington à Israël dans sa vaste opération militaire à Gaza.

"De manière générale, les Etats-Unis sont en ce moment sur la défensive en Afrique, étant donné leur soutien à Israël"
, explique Jakkie Cilliers, de l'Institut pour les études de sécurité (ISS), installé à Pretoria.

Le momentum a, semble-t-il, basculé du côté de la Russie et de la Chine.

Lors de cette tournée, le secrétaire d'Etat n'a pas fait étape en Afrique du Sud, qui a intenté une procédure devant la Cour de justice internationale contre Israël, qu'elle accuse de
"génocide"
à Gaza.

Blinken a discuté du Moyen-Orient au téléphone avec son homologue sud-africaine Naledi Pandor et a assuré à des journalistes que les accusations de l'Afrique du Sud, selon lui
"dénuées de fondement",
n'empêcheraient pas Washington de continuer à travailler avec Pretoria.

De l'Atlantique à l'océan Indien


Pour Steven Gruzd, de l'Institut sud-africain des Affaires internationales, le mandat de Joe Biden a certes été marqué par une plus grande attention des Etats-Unis à l'Afrique, largement ignorée par son prédécesseur Donald Trump, mais
"les crises en Ukraine et à Gaza ont pris le dessus".

Cela dit, si
"les Etats africains commencent à s'identifier davantage au Sud global qu'aux Etats-Unis, le commerce avec les USA demeure d'une importance vitale"
, relève-t-il.

L'administration américaine martèle sa volonté de nouer des partenariats de long terme plutôt que de privilégier des projets tape-à-l'œil, une allusion aux grands projets d'infrastructures de la Chine sur le continent ,comme le stade de football d'Abidjan où M. Bliken a assisté à la rencontre de la CAN, ou aux alliances de circonstances du groupe paramilitaire russe Wagner avec des régimes issus de coups d'Etat.


Les initiatives concrètes portées par les Etats-Unis sur le continent n'ont toutefois pas été totalement absentes de la tournée.


En Angola, M. Blinken a visité le chantier du "couloir Lobito"
,
ambitieux projet d'infrastructure en Afrique co-financé par les Américains et destiné à relier la Zambie et la République démocratique du Congo (RDC), riches en ressources minières, au port de Lobito, en Angola.

Le projet vise ultimement à établir une liaison ferroviaire de 1 300 kilomètres reliant l'Atlantique à l'océan Indien, avec un financement dédié à la construction des voies ferrées.


M. Blinken a également mentionné la mise à disposition future de semences plus résistantes à la sécheresse.


À lire également:




#USA
#Afrique
#diplomatie
#commerce
#Antony Blinken
#Joe Biden
#Naledi Pandor
#Donald Trump
#Bola Tinubu
#Femi Mimiko