Niger: polémique autour du fichier spécial des personnes accusées de terrorisme

La rédaction
16:4128/09/2024, samedi
Yeni Şafak
Crédit Vidéo : Yasser Ulrich / Nouvelle Aube
Une ordonnance instituant le fichier des personnes, groupes de personnes ou entités impliquées dans des actes terroristes a suscité un vif débat dans la société civile nigérienne.

A la fin du mois d’août, le président Abdourahamane Tiani a signé une ordonnance instituant  le fichier des personnes, groupes de personnes ou entités impliquées dans des actes terroristes. Cette mesure a suscité un vif débat dans la société civile nigérienne avec d’un côté, ceux qui saluent cette décision et de l’autre, ceux qui dénoncent un acte visant à restreindre les droits et liberté des Nigériens sous le prétexte de lutter contre le terrorisme.

Les autorités précisent que l'inscription d'une personne, d'un groupe de personnes ou d'une entité au fichier intervient dès l'ouverture d'une enquête ou d'une procédure judiciaire après une condamnation judiciaire sur demande des services de renseignement. Pour Bana Ibrahim, un activiste de la société civile, c’est une décision salutaire compte tenu du contexte qui prévaut au Niger depuis plusieurs années. Il fait une comparaison avec les Etats Unis qui ont institué "Patrioct Act" pour des raisons de lutte contre le terrorisme.

 

"Il y a quand même eu la signature du "Patriot Act" qui permet aux Etats Unis de maintenir en détention pendant une dizaine d’années des personnes, soupçonnées de connivence avec des groupes terroristes. C’est de cette même manière qu’on doit reconnaître à nos pays, à un certain moment pour faire face aux actes terroristes, à la guerre asymétrique qui nous est imposée, parfois de prendre certaines décisions qui peuvent écorcher la démocratie, qui peuvent écorcher les liberté fondamentales"
, justifie-t-il.

Ibrahim Mounkaïla, un autre activiste de la société civil trouve aussi que ce fichier est indispensable pour mettre hors d’état de nuire, toutes les personnes qui ont eu des liens avec le terrorisme.


"C’est effectivement une sanction, ou une méthode assez thérapeutique pour guérir le Niger, n’est-ce pas, de toutes ces maladies-là, de ces mauvaises graines, de ces germes parce que le pays est infesté"
, indique-t-il.

Au Niger, tout le monde n’est pas de cet avis. Beaucoup estiment que les autorités peuvent se servir de ce fichier pour régler des comptes à leurs adversaires politiques ou aux voix discordantes qui critiquent le gouvernement.

Le lanceur d’alerte Maman Kaka Touda dénonce cette décision du président Tiani. Il trouve que texte qui institut ce fichier est une porte ouverte aux violations des droits et libertés des citoyens.


"On a inclus dans cette ordonnance des notions fourre-tout comme, trouble à l’ordre public. Aujourd’hui, nous qui sommes très actifs sur les réseaux sociaux, facilement, on peut nous prendre, en disant qu’on a diffusé des contenus visant à troubler l’ordre public"
, détaille Maman Kaka Touda.

Quant à Me Hamani Assoumane, un avocat qui s’active dans la défense des droits et libertés, il invite les autorités à laisser la possibilité aux personnes soupçonnées de connivence avec le terrorisme, d’exercer des voies de recours.  


"Quand vous voyez, avant même l’avènement de ce fichier-là, certaines dispositions du code pénal font en sorte que, dès l’instant où vous posez un certain nombre d’actes antinationaux, contre votre pays, dans son bon droit de façon classique, la justice peut vous condamner  à des peines accessoires. Il y a la peine privative de liberté qui peut aller à 10 ans 30 ans, mais il se trouve qu’au vue de la gravité de la faute, on peut vous déchoir de votre nationalité. Mais le plus important, c’est que dans la mise en œuvre, l’Etat doit faire la part des choses. Tout citoyen qui n’est pas impliqué, en tout cas s’il est avéré qu’il n’y a pas de soupçon sur cette personne, la personne doit pouvoir jouir de ses libertés fondamentales",
explique l’avocat.   

Selon ce nouveau texte, les infractions portant atteinte aux intérêts stratégiques et/ou fondamentaux de la nation telles que le port d'armes contre l'État, l'intelligence avec une puissance étrangère et la fourniture de renseignements tenus secrets dans l'intérêt de la défense nationale seront désormais sévèrement punies.


Par
Ulrich Yasser

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