L'ancien farouche opposant à la "dynastie Déby" au Tchad, Succès Masra, a finalement rallié la junte militaire cinq mois avant la présidentielle de lundi. Un "traître", comme l'en accuse l'opposition, ou un fin tacticien qui pourrait bouleverser le scrutin ?
Depuis 15 jours qu'il bat la campagne, ce brillant tribun, quoiqu'un peu cabotin et grandiloquent, draine des foules considérables dans tout le pays. Au point de se dire convaincu de l'emporter dès le premier tour, ce qu'il n'osait avancer deux semaines plus tôt.
"Bouclier du peuple"
À la présidentielle de 2021, il s'était déjà présenté contre le maréchal Déby mais sa candidature avait été invalidée.
Dès 2018, Masra est la seule figure de l'opposition capable de mobiliser des centaines, voire des milliers de partisans dans la capitale même, lors de manifestations systématiquement violemment réprimées, dans le sang parfois.
"Candidature postiche"
Plus de 300 très jeunes hommes, selon l'opposition et des ONG, une cinquantaine selon la junte, sont tués par les balles des soldats et policiers, et plus d'un millier arrêtés, la grande majorité déportée dans un sinistre bagne en plein désert. D'autres sont torturés, exécutés ou portés disparus, selon des ONG internationales.
Au point que la question est sur toutes les lèvres depuis quinze jours : qui a berné l'autre lors de l'accord de réconciliation?