Crédit Photo : HECTOR RETAMAL / AFP
Des personnes visitent l'exposition internationale sur les soins aux personnes âgées, la médecine de réadaptation et les soins de santé (CHINA AID 2024) au Shanghai New International Expo Centre (SNIEC) dans le district de Pudong à Shanghai, le 13 juin 2024.
En relevant l'âge de départ en retraite, la Chine soulage temporairement son système, mais risque de décourager les jeunes travailleurs sans freiner pour autant les effets du déclin démographique.
À partir de 2025, et en l'espace de 15 ans, l'âge légal de la retraite pour les hommes sera progressivement porté à 63 ans, contre 60 ans actuellement. Pour les femmes, il passera de 50 à 55 ans, ou de 55 à 58 ans, selon le type de travail exercé.
Pour Zhao Litao, chercheur à l'Institut de l'Asie de l'Est de l'Université nationale de Singapour, il était temps d'agir car
"le système de retraite est sous forte pression"
:
Pour les dirigeants, il était de plus en plus risqué de retarder la réforme.
L'âge de départ à la retraite en Chine, l'un des plus bas au monde, n'avait pas été relevé depuis des décennies. Il avait été fixé à une époque de pénurie et de pauvreté généralisées, bien avant que les réformes économiques n'apportent des améliorations en matière de pouvoir d'achat, de nutrition, de santé et de conditions de vie.
Résultat: l'espérance de vie a grimpé, passant d'environ 50 ans au début des années 1960 à 79 ans en 2022, selon la Banque mondiale.
Mais ces dernières années, la deuxième économie mondiale fait face à un ralentissement de sa croissance, parallèlement au vieillissement de sa population et à une crise de la natalité, mettant en péril ses systèmes de retraite et de santé publique.
Le gouvernement ne pouvait plus repousser l'échéance, car
"le rythme de vieillissement et de déclin de la population est plus rapide que prévu"
, note Zhao Litao. En 2023, la population a diminué pour la deuxième année consécutive.
Le système de retraite chinois repose sur trois piliers : une retraite basique versée par l'État, des plans de retraite obligatoires dans les entreprises, et des fonds de pensions privés sur la base du volontariat.
Mais d'ici 2035, l'un des principaux fonds gérés par l'État pourrait être à sec en raison du recul de la population active, prédisait en 2019 un cercle de réflexion gouvernemental.
Un tiers des provinces chinoises affichent déjà un déficit de leur fonds de retraite.
Le report du départ en retraite permettra de soulager le système
en
le recul du nombre de travailleurs, observe Xiujian Peng, chercheuse à l'Université Victoria en Australie.
Mais,
"la population active continue de décliner, c'est une tendance"
à long terme.
Et les jeunes générations, déjà confrontées à un chômage élevé ou à une pression extrême au travail qui affecte leur santé physique et mentale, auront du mal à accepter la réforme.
"Pour beaucoup de Chinois, ces changements dans la politique de retraite s'apparentent à une promesse non tenue en matière de protection sociale"
, observe Yun Zhou, sociologue à l'Université du Michigan.
"Comme les discriminations fondées sur le sexe et l'âge restent profondément ancrées dans le marché du travail chinois, il faudra voir dans quelle mesure les travailleurs peuvent bénéficier d'une protection efficace de leurs droits",
ajoute-t-elle.
Pour Dali Yang, professeur de sciences politiques à l'Université de Chicago, la question des retraites nuit à la
du gouvernement.
Dans un environnement économique incertain, nombre de Chinois préféraient, ces derniers temps, dépenser leur argent plutôt que d'épargner pour leur retraite.
"Maintenant, ils sont encore moins motivés"
par l'idée de contribuer au fonds de retraite.
"Si de plus en plus de gens font ça, ça devient un cercle vicieux et rend le système encore moins tenable"
, juge le professeur.
Les médias d'État chinois défendent une réforme jugée
, compte tenu du développement du pays.
Mais les experts estiment qu'elle ne s'attaque pas à la racine du problème: un pays dont la population âgée augmente et des jeunes moins nombreux et moins motivés pour travailler et financer les retraites.
Parmi les pistes qu'ils suggèrent: créer des emplois qualifiés, améliorer la productivité, étendre le système public de santé, atteindre un meilleur équilibre entre travail et vie privée et permettre une promotion sociale des femmes.
Dans les prochaines années,
"il y a encore énormément de marge pour continuer à repousser l'âge de la retraite"
, estime aussi Zhao Litao.
Mais, si les jeunes
"doivent travailler plus longtemps et cotiser davantage (...) ils veulent obtenir des réponses à des questions telles que la sécurité et la qualité de l'emploi, ainsi que le niveau de leur future pension de retraite"
.
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