Nigéria: la pénurie de liquidités alimente la méfiance envers les points de vente bancaires informels

11:329/12/2024, Pazartesi
AFP
Des voyageurs montent à bord d'un bus en direction du nord du Nigéria avant les fêtes de fin d'année, à la gare routière d'Iddo, à Lagos, le 18 décembre 2023.
Crédit Photo : Benson Ibeabuchi / AFP Archive
Des voyageurs montent à bord d'un bus en direction du nord du Nigéria avant les fêtes de fin d'année, à la gare routière d'Iddo, à Lagos, le 18 décembre 2023.

La méfiance s'intensifie au Nigéria envers les opérateurs de points de vente (POS), devenus essentiels pour de nombreux habitants, notamment dans les zones rurales où les banques traditionnelles sont absentes. Ces vendeurs d'argent mobiles permettent de retirer des espèces via des terminaux bancaires, mais les frais qu’ils imposent sont jugés "exorbitants" par une grande partie de la population.

"Les commissions qu'ils prélèvent sont de plus en plus élevées, et il est difficile d'obtenir de l'argent dans les distributeurs automatiques",
témoigne Ibrahim Adamu, commerçant à Lagos.
Cette mégalopole de près de 15 millions d’habitants, comme d’autres villes du pays, fait face à des pénuries chroniques de billets de banque.

Un pilier pour le système bancaire, mais controversé


Depuis leur apparition en 2013, les opérateurs POS se sont multipliés dans tout le pays, facilitant l'accès aux services financiers.


En décembre 2023, environ 52 % des Nigérians adultes utilisaient les banques traditionnelles, selon l'organisation EFInA. Les points de vente comblent le vide laissé par ces institutions dans les zones rurales et les quartiers urbains.

"Il y en a trois dans ma rue. Je n’ai donc pas besoin de prendre un taxi pour atteindre un distributeur",
souligne Chi Etche, directeur dans un média. Toutefois, cette accessibilité a un coût, exacerbé par la récente pénurie de liquidités liée à une tentative infructueuse de remplacer les billets en 2022-2023.

Uzoma Dozie, fondateur de la banque digitale Sparkle, dénonce ces pratiques:


Certains opérateurs exploitent la pénurie de liquidités en facturant des frais excessifs pour les retraits et les transactions.

La Banque centrale au cœur des critiques


La Banque centrale du Nigéria (CBN), dirigée par Olayemi Cardoso, est accusée d’avoir aggravé la situation par ses politiques restrictives. Depuis 2023, les retraits aux guichets automatiques sont plafonnés à 20.000 nairas (12 euros) pour sa propre banque et à 5.000 nairas (3 euros) pour une autre. Les retraits en agence de sommes plus importantes entraînent également des frais.


Cette situation pousse les clients à se tourner vers les opérateurs POS, qui eux-mêmes obtiennent parfois leurs liquidités auprès de sources non officielles. Parallèlement, des soupçons pèsent sur les banques, accusées de détourner des fonds destinés aux distributeurs automatiques au profit des opérateurs POS.

Lors d’un dîner à Lagos, le gouverneur Cardoso a promis de ne plus tolérer les distributeurs automatiques vides et d’imposer des sanctions aux banques défaillantes.


Cependant, de nombreux économistes appellent à une réglementation claire pour freiner les abus dans le secteur des POS et résoudre les problèmes structurels du système bancaire.


Un futur incertain pour les Nigérians


Alors que les longues files d’attente dans les banques et les interruptions fréquentes des distributeurs continuent de peser sur la population, les opérateurs POS, malgré leurs frais élevés, restent une bouée de sauvetage pour de nombreux Nigérians.


Pourtant, leur succès reflète une crise plus profonde: la nécessité d'une réforme du système financier du pays pour garantir une meilleure accessibilité et une régulation stricte.


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