Depuis plusieurs jours, les médias locaux font leurs gorges chaudes de ce "Game of Thrones" nigérian qui souligne le poids des institutions traditionnelles dans le jeu politique national du pays le plus peuplé d'Afrique.
Les émirs du Nord, région majoritairement musulmane, ainsi que les Obas ou rois et autres chefs traditionnels du Sud, majoritairement chrétien, continuent d'exercer une grande influence au Nigeria.
La semaine dernière, le gouverneur de l'État de Kano, Abba Kabir Yusuf, a rétabli l'ancien émir Muhammadu Sanusi II sur le trône, quatre ans après sa destitution par le gouverneur précédent au profit d'Aminu Ado Bayero, lequel avait été destitué jeudi.
De son côté, M. Sanusi a emménagé samedi dans le palais où il tient des audiences quotidiennes, à quelques kilomètres de la résidence royale de M. Bayero qui y reçoit ses partisans.
Les deux palais sont gardés par un lourd dispositif militaire et policier.
Si la ville conserve un calme apparent, la fébrilité augmente au fur et à mesure que se rapproche l'échéance judiciaire.
Dimanche, des partisans de M. Bayero ont organisé une manifestation pour dénoncer sa destitution.
Selon Husseini Gumel, le commissaire de police de l'État de Kano, ces fauteurs de troubles ont été envoyés par des hommes politiques moyennant rémunération.
En fait, le bras de fer royal entre Sanusi et Bayero est un combat par procuration entre deux anciens gouverneurs de cet Etat.
En 2015, la donne a changé pour Sanusi lorsque Abdullahi Umar Ganduje a succédé à Kwankwaso en tant que gouverneur.
Ganduje, qui est l'actuel président national de l'APC (au pouvoir), était le bras droit et le protégé politique de Kwankwaso lorsque Sanusi a été nommé émir, mais les deux se sont brouillés et sont devenus des adversaires politiques.
Ainsi, les gouverneurs ont tout intérêt à avoir des émirs qui leur sont favorables afin de se maintenir au pouvoir.
En rappelant Sanusi sur le trône de Kano, le gouverneur Yusuf a consolidé son autorité politique ainsi que celle de son protecteur, Kwankwaso, ainsi que celle de leur nouveau parti, le New Nigeria People's Party (NNPP).
De son côté, Ganduje tient à maintenir Bayero sur le trône pour assurer sa propre influence et celle de son parti, l'APC.