Le 19 avril, trois explosions ont été entendues dans le centre de l’Iran, notamment à Ispahan. Le système de défense antiaérienne iranien aurait en effet neutralisé des drones attribués par certaines sources à Israël. Si cet acte perçu comme la riposte sioniste annoncée est restée pour le moins sans réel danger, elle a fait craindre plus que jamais un contexte d’escalade entre les deux ennemis jurés du Moyen-Orient.
Dans sa "guerre froide" avec Israël, l’Iran s’est toujours appuyé sur des groupes soutiens, dont notamment le Hezbollah libanais, pour cibler les intérêts et installations israéliens. Pour la première fois, Teheran a directement lancé des missiles sur Israël, ce qui veut dire que l’affrontement d’Etat à Etat serait désormais le nouveau paradigme en vigueur dans ce conflit.
Israël qui est connu pour son jusqu’au-boutisme conflictuel pourrait bien attaquer à nouveau des installations iraniennes et semer davantage les graines d’une escalade dangereuse. Les pays occidentaux, soutiens sans condition d’Israël même sur le génocide à Gaza, continuent néanmoins les tractations diplomatiques pour que le conflit ne s’enlise pas.
Une guerre au Moyen-Orient et surtout les attaques contre l’Iran, pourraient pousser le régime perse à user de ses leviers géopolitiques et géoéconomiques.
Même si l’Iran n’utiliserait ce levier qu’en dernier ressort puisque son économie en dépendrait aussi, Teheran a plusieurs fois brandi la menace de son blocage contre les Occidentaux soutiens d’Israël. Un conflit ouvert entre les deux camps, pourrait aboutir à la mise à exécution de ces menaces.
Par ailleurs, l’impact de l’Iran et sa capacité à gêner le commerce mondial ne se limite pas au détroit d’Ormuz. En cas de conflit, Teheran disposerait d’une autre carte : les Houthis du Yemen et le détroit de Bab-el Mandeb. Soutiens du régime iranien et perçus d’ailleurs comme l’un de ses groupes "proxys", les Houthis pourraient bloquer le détroit de Bab-el Mandeb eux aussi de leur côté en cas de conflit ouvert avec Israël. Ce détroit est tout aussi important que celui d’Ormuz.
Situé entre le Yemen, Djibouti et l’Érythrée, le détroit de Bab-el Mandeb qui relie la Mer Rouge au Golfe d’Aden, voit transiter dans ses eaux chaque jour quelque 4,5 millions de barils de pétrole des pays du Moyen-Orient et d'Asie vers l'Occident, selon l'Administration américaine d'information sur l'énergie (US Energy Information Administration).
Il est utilisé aussi pour faire passer 8% des cargaisons mondiales de gaz naturel liquéfié. C’est le couloir maritime le plus utilisé au monde avec 40% du commerce maritime mondial y transitant.
Les Houthis ont déjà convaincu de leur capacité à user de ce levier pour porter atteinte à des fins politiques. Depuis le début du génocide qu’Israël mène à Gaza depuis octobre dernier, les Houthis ont perturbé le commerce mondial en ciblant tout navire israélien ou de pays pro-Israël qui emprunteraient le détroit de Bab-el Mandeb. Cela a poussé plusieurs navires à faire le contour de l’Afrique pour acheminer leurs marchandises.
Une guerre israélo-iranienne embraserait tout le Moyen-Orient mais aurait surtout des conséquences économiques désastreuses. Cependant, si Téhéran usait de ce levier, il n’entrerait pas juste en guerre contre Tel-Aviv mais aussi contre Washington et ses alliés de l’Ouest dont les importations dépendant cruellement des couloirs maritimes stratégiques.