France: le Gouvernement en croisade contre l’abaya pour sauver la République

La rédaction
16:0829/08/2023, الثلاثاء
MAJ: 29/08/2023, الثلاثاء
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Crédit photo: MIGUEL MEDINA / AFP
Crédit photo: MIGUEL MEDINA / AFP

Le couperet est finalement tombé dimanche soir, sans grande surprise: l’abaya va être interdite dans les établissements scolaires français dès la rentrée prévue le 4 septembre prochain.

"La République est testée, nous devons faire bloc"
a plaidé le ministre de l’Éducation nationale, Gabriel Attal, pour confirmer la mise en place de cette nouvelle mesure restrictive.

Depuis, les réactions fusent et la décision de l’Exécutif est plébiscitée à droite et à l’extrême-droite, tandis qu’elle suscite de vives inquiétudes du côté de la gauche, qui pointe une nouvelle polémique ciblant les femmes musulmanes.


Stigmatisation et islamophobie


Avant même l’annonce du ministre, la question des abayas (et des qamis) était revenue sur les devants de la scène avec la diffusion de chiffres incluant le port de cette robe longue comme
"atteinte à la laïcité"
en milieu scolaire.


Interrogé par Anadolu, le député LFI (la France insoumise), Carlos Martens Bilongo fustige une
"police du vêtement"
à travers
"une polémique de plus pour stigmatiser une partie de la population française à savoir les musulmans"
.

"C’est anti constitutionnel et il n’y aura pas de texte au parlement"
assure l’élu du Val d’Oise qui se demande déjà
"comment faire la différence entre une robe gothique, une robe longue de chez Gucci, une robe H&M ou une abaya culturelle à part via l’option juger en fonction de celle qui porte ce vêtement?"
grince le député de gauche.

Le ressenti est sensiblement le même du côté des associations musulmanes qui voient dans cette interdiction, une surenchère à l’encontre des musulmans.

Pour Sabah, militante associative à Avignon, interrogée par Anadolu,
"la volonté du gouvernement est clairement de stigmatiser les jeunes filles de confession musulmane ou perçue comme telles dès le premier espace de socialisation de l’Homme, (après la famille), qu’est l’école et qui constitue un pilier fondamental dans sa construction".

Elle rappelle, à cet effet, que
"le rôle de l’école républicaine laïque est de créer les conditions d’une ouverture sur le monde afin de permettre aux élèves de s’émanciper à travers l’altérité et la tolérance"
qu’elle qualifie de
"leviers d’une construction identitaire participant à faire de l’adulte de demain un citoyen à part entière et non entièrement à part"
.

L’abaya, un vêtement religieux?


Dès le mois de juin, le CFCM (Conseil français du culte musulman) avait été forcé de réagir au début de polémique en qualifiant l’agitation ambiante de
"énième débat sur l'islam et les musulmans avec son lot de stigmatisations"
.


Mais face à l’annonce de Gabriel Attal et donc à la confirmation de l’interdiction de l’abaya, le CFCM a de nouveau pris la parole à travers un communiqué de presse diffusé lundi.


L’organisation musulmane redoute désormais
"qu'en l'absence de vraie définition, l’abaya ne soit définie non pas en fonction de critères objectifs (qui n'existent pas) mais d'une manière purement arbitraire, en fonction du "PROFIL" des filles et des femmes qui la portent, de leur origine et de leur religiosité supposées, ce qui serait un précédent extrêmement grave, dangereux et discriminatoire"
.

"À moins d'interdire purement et simplement le port de toute robe longue à l'école et par tous, élèves et professeurs compris, quelle que soit leur appartenance ou non à une religion, il sera impossible d'appliquer une mesure visant spécifiquement l’abaya sans tomber dans les travers de la discrimination et de l'arbitraire"
détaille le CFCM.

Et la question du caractère religieux ou pas de l’abaya, ne se pose pas seulement dans les structures musulmanes puisque plusieurs politiques ont déjà réagi, notamment sur les réseaux sociaux en se demandant comment les chefs d’établissements, allaient déterminer les vêtements qui sont de simples robes longues, et celles susceptibles de revêtir un caractère religieux.


Sabah, qui poursuit pour sa part des études de droit dans le Vaucluse, estime que
"la France, pays des droits de l’Homme et donneuse de leçon (…) use de lois liberticides et d’une laïcité dévoyée"
et mentionne par exemple
"la loi de 2004 venue interdire le port de signes religieux"
.

"Aujourd’hui l’interdiction s’étend à un vêtement que le CFCM a pourtant considéré comme ne relevant pas d’une pratique confessionnelle; il s’agit en réalité d’un style vestimentaire adopté dans les pays arabes et qui constitue donc une pratique culturelle et non cultuelle"
tranche la jeune femme.

Une course vers la droite


Si le gouvernement doit dévoiler à l’automne, sa proposition de loi sur l'immigration, le décor est déjà planté avec une nécessité absolue de nouer des alliances avec la droite puisque la majorité ne dispose pas d’une majorité absolue à l’Assemblée Nationale.


"Nous sommes très loin d’assister à un véritable sujet qui angoisse les Français si on prend le nombre de signalement sur l’abaya et le nombre d’enfants scolarisés de 2023… C'est ridicule"
, souligne Carlos Martens Bilongo qui pense qu’il s’agit là d’une
"course à 2027 entre Darmanin et les poulains du Président"
.

Il explique à ce propos que
"l’agenda parlementaire va arriver avec différents textes"
mais rappelle
"la volonté affichée par Nicolas Sarkozy de créer un arc réactionnaire [ripoublicain] qui va de Macron à Zemmour"
et dont il pense qu’ils
"sont entrain de poser les fondations de ce chantier au travers de chacun des textes et décrets"
.

Publication X du fondateur de Reconquête et ancien candidat à l’élection présidentielle, Éric Zemmour.

Et pour cause, si les déclarations de Gabriel Attal au sujet de l’abaya font l’unanimité à droite, le fondateur de Reconquête et ancien candidat à l’élection présidentielle, Éric Zemmour s’est lui aussi réjoui.


Affirmant que
"l’interdiction des abayas est un premier bon pas si elle est appliquée"
il propose désormais
"la généralisation du port de l’uniforme pour éviter"
ce qu’il qualifie de
"provocation islamique à l’école"
.

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