Crédit Photo : SAKIS MITROLIDIS / AFP
Un train hellénique passant devant des banderoles accrochées à l'endroit où 57 personnes, pour la plupart des étudiants, ont perdu la vie dans un accident de train en 2023, près de Larisa, en Grèce, le 24 février 2024.
Un an après la catastrophe ferroviaire qui a fait 57 morts en Grèce, les familles des victimes et des dizaines de blessés réclament justice et mettent en cause des responsables politiques accusés de graves négligences sur le réseau ferré.
Le 28 février 2023, avant minuit, un train de passagers qui relie Athènes à Thessalonique (nord) heurte frontalement un convoi de marchandises à Tempé, près de la ville de Larissa, à 350 km au nord d'Athènes.
Durant les 19 minutes qui ont précédé l'accident, les deux trains dont l'un transportait plus de 350 passagers ont circulé sur la même voie sans qu'aucun système d'alarme ne soit déclenché.
Cinquante-sept personnes, dont beaucoup d'étudiants de retour d'un week-end prolongé, sont tuées.
La collision bouleverse la Grèce qui descend massivement dans les rues pour exprimer sa colère dans les semaines qui suivent. Dans un climat de défiance générale marqué par des violences, les manifestants scandent:
Ils s'en prennent à la compagnie des chemins de fer et aux responsables politiques, au premier rang desquels le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis, accusés d'incurie.
Contrit, ce dernier, dont le camp conservateur décrochera la majorité absolue lors des élections législatives près de 4 mois plus tard, demande
aux Grecs pour cette
Depuis, 34 employés des chemins de fer ont été poursuivis mais aucun responsable de haut rang. Deux d'entre eux, dont le chef de gare de Larissa qui a reconnu des erreurs après son interpellation au lendemain de la catastrophe, sont en détention provisoire pour
"homicide par négligence"
. Leur procès doit commencer en juin.
Un an plus tard, les familles des victimes participeront mercredi à une cérémonie sur les lieux de l'accident tandis que dans tout le pays une grève du secteur public est annoncée.
Le collectif des représentants des familles des victimes met en cause
"le gouvernement actuel et des gouvernements précédents"
pour les retards pris dans la mise en place de systèmes automatiques de sécurité dans les chemins de fer.
Le réseau ferré grec, peu développé, est notoirement vétuste et les syndicats de cheminots avaient tiré la sonnette d'alarme à plusieurs reprises avant l'accident, sans être entendus.
Dans son cabinet médical de Thessalonique, la pédiatre Maria Karystianou, mère de Marthi, 19 ans, tuée dans la collision, évoque, dans un entretien à l'AFP, les responsabilités des hommes politiques qui ont, selon elle,
"laissé les trains fonctionner dangereusement".
Ils savaient qu'il y avait un risque de mort.
"On ne peut pas parler de négligence",
assure cette femme dont l'intervention, poignante et accusatrice, devant une commission d'enquête parlementaire en janvier a bouleversé les Grecs.
"Est-il possible que 57 personnes soient mortes alors qu'elles n'étaient que des passagers d'un train et que le ministre des Transports n'ait aucune responsabilité pénale?"
, s'emporte-t-elle.
De nombreux corps ont été carbonisés au point d'être méconnaissables et certains passagers n'ont pu être identifiés qu'à partir de morceaux de corps.
Les témoignages de familles en pleurs attendant désespérément des nouvelles de leurs enfants ont contribué à jeter l’opprobre sur les responsables politiques.
Dans la commission d'enquête parlementaire, l'ancien ministre des Transports, Kostas Karamanlis, qui avait démissionné au lendemain de l'accident, a insisté sur le fait que même des systèmes automatisés n'auraient pas nécessairement évité l'accident.
Des accidents mortels se sont produits dans d'autres pays européens dotés de meilleurs systèmes de sécurité, a assuré ce député de droite réélu quatre mois plus tard.
Lors d'une intervention devant le Parlement européen mi-février, Maria Karystianou a accusé
"les coupables qui (...) ne sont pas punis en Grèce".
Une pétition lancée à son initiative visant à réviser la Constitution grecque afin de faciliter les poursuites judiciaires à l'encontre des ministres et des députés a déjà recueilli plus de 700.000 signatures.
"J'essaie d'accepter la mort de mon enfant"
, confie Maria Karystianou, les yeux embués de larmes lorsqu'elle évoque le souvenir de sa fille étudiante qui revenait à Thessalonique après avoir célébré le carnaval.
"Ça me dérange de me réveiller le matin et de ne rien faire pour réclamer justice pour sa mémoire et pour celle de toutes les victimes. C'est ce qui me fait vivre"
, conclut-elle.
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