ÉDITION:

Thaïlande: le vainqueur des élections menacé de suspension, nouvelle vague d'incertitudes

La rédaction
10:5312/07/2023, Çarşamba
MAJ: 12/07/2023, Çarşamba
AFP
Le député vainqueur des législatives thaïlandaises, Pita Limjaroenrat. Crédit photo: SARAH LAI, PANUMAS SANGUANWONG, PITCHA DANGPRASITH / AFPTV / AFP
Le député vainqueur des législatives thaïlandaises, Pita Limjaroenrat. Crédit photo: SARAH LAI, PANUMAS SANGUANWONG, PITCHA DANGPRASITH / AFPTV / AFP

Le candidat au poste de Premier ministre de la Thaïlande, Pita Limjaroenrat, vainqueur des législatives en mai, risque une suspension de l'Assemblée nationale, recommandée mercredi par la commission électorale pour des soupçons d'irrégularités.

L'annonce plonge le royaume dans l'incertitude, à la veille du vote attendu par les députés et les sénateurs réunis pour désigner le prochain chef du gouvernement, fonction que seul Pita brigue pour le moment.


Les électeurs ont infligé en mai une défaite cinglante au camp conservateur, mais l'alternance réclamée risque de heurter le mur d'une Constitution favorable aux intérêts de l'armée qui l'a rédigée, au risque d'engendrer de nouvelles manifestations.


La commission électorale a estimé qu'il y avait suffisamment d'éléments pour transmettre à la Cour constitutionnelle le dossier du député Move Forward, accusé d'avoir possédé durant la campagne des actions dans une chaîne de télévision, en contradiction avec la loi.


Le président de l'instance Ittiporn Boonprakong, interrogé par l'AFP, a confirmé qu'il recommandait la suspension de Pita, visage du renouveau politique en Thaïlande.


Le parlementaire âgé de 42 ans, qui risque la prison, la perte de son siège et l'inéligibilité durant 20 ans, se défend de toute manœuvre illégale.

Le royaume espère un nouveau Premier ministre, après une quasi-décennie de domination militaire qui a vu les libertés fondamentales reculer et la croissance économique stagner.


"Précipitation"


Le parti Move Forward a créé la surprise sur la base d'un programme de rupture qui fait écho aux revendications des protestations géantes de 2020 pour plus de démocratie.


Malgré le ralliement d'autres partis d'opposition pro-démocratie, dont le puissant Pheu Thai associé à l'ancien Premier ministre en exil Thaksin Shinawatra, qui lui offre la majorité absolue à l'Assemblée nationale, Pita Limjaroenrat reste bloqué sur le perron du pouvoir.


Ses soutiens voient dans la décision de la commission électorale, un nouvel obstacle dressé par les milieux conservateurs pro-armée qui désapprouvent son programme jugé trop radical.


C'est un
"abus de pouvoir"
, a dénoncé Move Forward dans un communiqué, qui assure que la commission électorale n'a pas donné à Pita
"la possibilité de s'expliquer"
.

"Pourquoi autant de précipitation ? Je ne vois qu'une seule raison, c'est pour influencer le résultat de vote"
de jeudi, a expliqué à l'AFP Prinya Thaewanarumitkul, professeur de droit public à l'université Thammasat de Bangkok.

"Les sénateurs ont besoin d'une raison pour ne pas voter pour le candidat issu du parti vainqueur, qui dispose de plus de la moitié des sièges. Il fallait une raison pour justifier leur action et la voilà"
, a-t-il estimé.

Malgré une coalition majoritaire à la Chambre basse (312 députés sur 500), Pita Limjaroenrat a besoin du ralliement d'une soixantaine des 250 sénateurs pour accéder au pouvoir. Or une partie de la Chambre haute, dont les membres ont été nommés par les militaires, s'y refuse.

Son projet controversé de réformer la loi réprimant sévèrement la lèse-majesté, a tracé une ligne rouge avec les sénateurs, gardiens autoproclamés des valeurs traditionnelles.


Risque de tensions


"Le vote du 13 juillet n'est pas au sujet de Pita ou de Move Forward, mais c'est un vote pour s'assurer que la Thaïlande s'engage sur la voie normale de la démocratie"
, a assuré mardi Pita Limjaroenrat, plaidant pour un gouvernement issu de la volonté du peuple.

En cas d'échec jeudi, députés et sénateurs se réuniront autant de fois que nécessaire jusqu'à la nomination d'un Premier ministre, avec la possibilité que le consensus se fasse autour d'un autre candidat.


La Cour constitutionnelle doit désormais indiquer si elle accepte de se saisir du dossier.


La puissante instance est impliquée dans plusieurs des crises cycliques qui caractérisent la vie politique thaïlandaise, entre interférences de l'armée et de la justice dans le processus démocratique, et manifestations massives, parfois violentes.

La Thaïlande a connu une douzaine de coups d'Etat réussis depuis la fin de la monarchie absolue en 1932.


La dissolution décidée en 2020 par la Cour constitutionnelle de Future Forward, le parti d'opposition dont Move Forward a repris le flambeau, a poussé dans les rues des milliers de jeunes en faveur d'une réforme en profondeur de la monarchie.


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