Au milieu de mesures de sécurité impressionnantes, cette première journée d'audience à Stuttgart a donné un aperçu de l'étrange idéologie jusqu'au-boutiste de ces neuf Allemands, âgés de 42 à 60 ans.
Assis derrière une vitre pendant l'audience, ils sont arrivés menottés, se cachant le visage avec des dossiers.
Coupes de cheveux banales, vêtus de pulls, chemises ou vestes, les neuf hommes, soupçonnés pour la plupart d'avoir été chargés des opérations militaires du réseau, sont restés calmes, répondant poliment aux juges sur leur identité.
Seuls deux d'entre eux ont annoncé vouloir s'exprimer sur les faits ultérieurement.
Les neuf suspects sont les premiers des 26 membres de ce réseau extrémiste à comparaître devant la justice.
Deux autres procès sont prévus dans quelques semaines à Francfort et Munich pour le reste du groupe.
Le groupuscule, nourri aux idéologies complotistes et d'extrême droite, notamment celle des "Reichsbürger" ("citoyens du Reich"), projetait d'envahir la chambre des députés allemands à Berlin pour y arrêter les élus et se faisait fort de renverser le gouvernement.
Les Reichsbürger regroupent des extrémistes de droite et amateurs d'armes qui rejettent la légitimité de la République allemande moderne:
ils croient en la pérennité du Reich allemand d'avant la Première Guerre mondiale, sous la forme d'une monarchie, et plusieurs groupes de sympathisants ont décrété la création de leurs propres mini-États.
Les neuf hommes étaient convaincus que l'Allemagne était dirigée par une
"secte conspiratrice d'élites pédophiles", s
elon l'acte d'accusation lu par le procureur.
Pour s'opposer à cette secte, ils croyaient en l'existence d'une
secrète entre différents États, dont la Russie et les États-Unis, qui les auraient aidés à libérer l'Allemagne, a expliqué le procureur.
Le cerveau présumé du réseau est un aristocrate et homme d'affaires septuagénaire, Henri XIII, dit prince Reuss, descendant d'une lignée de l'État de Thuringe.
Il sera jugé avec huit autres meneurs présumés, dont une ancienne députée d'extrême droite et un ex-haut gradé de l'armée, à Francfort à partir du 21 mai.
La mouvance s'était structurée fin juillet 2021, avec une organisation politique et militaire, en vue d'un coup d'État.
Sur le complot plane l'ombre de Moscou. La compagne présumée de Henri XIII, une ressortissante russe nommée "Vitalia B.", est en effet suspectée d'avoir
"mis en contact l'aristocrate avec le consulat général de Russie à Leipzig et l'y a accompagné en juin 2022".
Henri XIII cherchait à s'assurer du soutien de Moscou, même si, au moment du démantèlement de la cellule, le Kremlin avait démenti toute
.
Le réseau s'était donné les moyens de ses ambitions, avec
à disposition, ainsi qu'un
"arsenal d'environ 380 armes à feu, près de 350 armes blanches ainsi que 500 autres armes et au moins 148.000 munitions"
, selon les enquêteurs.
Il avait également acheté d'autres équipements, y compris des casques balistiques, des gilets pare-balles, des appareils de vision nocturne et des menottes.
À Stuttgart, la majeure partie des neuf accusés sont soupçonnés d'avoir tenté de recruter d'autres personnes dans les rangs de l'armée ou de la police allemande, ou parmi d'anciens membres de ces deux institutions.
Parmi les neuf suspects, Markus H. et Andreas M. faisaient partie des instances dirigeantes, tandis que Matthias H. et Steffen W. étaient responsables de la formation militaire.
Un autre suspect, Markus L., est en outre accusé de tentative de meurtre pour avoir tiré à bout portant sur des policiers en mars 2022.
Pour chacun des trois procès, Stuttgart, Francfort, Munich, la justice a prévu une cinquantaine de jours d'audience, jusqu'en janvier 2025 au moins.