Dans la capitale économique sud-africaine, gangrénée par la criminalité et une pauvreté souvent terrible, le quartier central de Brixton, composé de maison modestes en briques et ses barbelés en haut des murs, ouvre ses rues à un défilé festif.
Dans ces ruelles aux noms évocateurs de l'Angleterre Chiswick, Fulham ou High Street, c'est un plaisir rare de déambuler cheveux au vent et le nez en l'air, sans appréhension la nuit.
Et samedi soir, la fête a commencé vraiment dans le noir complet, le quartier subissant une de ces coupures de courant familières ici. Les lampadaires sont éteints, seules les strass placés dans les chevelures ou au bout de nattes, ou les guirlandes rechargées par des batteries scintillent sous la lune.
Beaucoup se sont déguisés, bricolant leurs propres costumes fluorescents.
Soudain de jeunes hommes apparaissent, des vaisseaux lumineux coiffant leurs têtes, qu'ils font balancer de haut en bas pour imiter le roulis d'un mer déchaînée. Ce convoi nautique dépasse de la foule, attirant les curieux des rues avoisinantes.
Au carrefour de deux ruelles, une famille d'origine portugaise a placé un haut parleur pour diffuser une musique évoquant le fado. Un peu plus loin, trois adolescents juchés sur un toit, dans des combinaisons noires surlignées de néons, enchaînent des chorégraphies au son d'un amapiano énergique, le son de la jeunesse sud-africaine, entre basse continue profonde et arrangements électroniques.
Soudain, se propulse un tricycle géant sur lequel trône une marionnette actionnée discrètement par un homme en noir.
Il ne veut pas donner son nom, pour rester discret. Ce n'est pas lui qui a construit cette belle mécanique. Son rôle à lui est simplement d'illuminer le visage de la marionnette d'une lampe torche pendant le défilé. Un petit garçon en poussette, fasciné et bouche ouverte, la dévore des yeux.