Au lendemain de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, les États baltes, qui ne sont pas membres de l'OTAN et qui ont toujours maintenu leur neutralité, ont réalisé qu'ils étaient confrontés à un risque important. Avec une frontière de 1340 kilomètres avec la Russie, la Finlande et la Suède ont déposé leur candidature à l'OTAN et ont demandé une accélération du processus d'adhésion. La Finlande a réussi à apaiser les inquiétudes de la Türkiye et est devenue membre, tandis que la Türkiye attend de la Suède qu'elle prenne des mesures concrètes pour mettre en œuvre la loi antiterroriste entrée en vigueur le 1er juin. La sous-estimation des réserves mises en avant par la Türkiye montre que l'alliance de l'OTAN n'a pas réussi à développer une réponse globale aux manifestations du terrorisme international en Europe. Indépendamment de l'adhésion de la Suède, la Türkiye devrait continuer à insister pour que la lutte contre le terrorisme international devienne l'un des objectifs communs au sein de l'OTAN, comme c'est le cas dans toutes les plates-formes internationales.
L'Ukraine, qui était depuis les années 2000 le lieu d'un conflit d'influence politique et économique entre l'Europe et la Russie, avec la promesse qu'elle deviendrait membre de l'OTAN, a dû payer le prix fort pour son alignement sur l'Occident. Avant l'invasion, la Russie avait exigé que l'OTAN mette un terme à son expansion et garantisse que l'Ukraine ne rejoindrait pas l'alliance. Les exigences russes, qui auraient conduit l'Ukraine à compromettre sa souveraineté nationale, ne visaient pas à trouver une solution, mais plutôt à créer une base "légitime" pour l'invasion de la Russie. Dans cette situation, l'Ukraine devait payer le prix d'une plus grande intégration à l'Occident. Face à cette situation, des pays non membres de l'OTAN, tels que la Finlande et la Suède, ont demandé leur adhésion afin d'éviter une situation similaire. Cependant, alors que l'Ukraine ne pouvait pas devenir membre après avoir payé un tel prix, la demande d'adhésion de ces pays à la vitesse de l'éclair était une contradiction en soi.
Les plans de la Russie visant à envahir et à annexer l'Ukraine sans rencontrer de résistance significative ont échoué pour plusieurs raisons. En 2022, l'armée ukrainienne, qui avait été sérieusement réorganisée depuis l'invasion de la Crimée en 2014, était beaucoup plus forte. Les services de renseignement américains ont prévenu l'invasion à l'avance, empêchant la Russie de lancer un raid soudain. En outre, le leadership de Zelensky, qui a refusé de quitter Kiev et de quitter le pays, a joué un rôle critique. Le fait que l'armée russe était beaucoup plus mal préparée et inefficace que prévu a également empêché la Russie de remporter un succès rapide. Face à ce tableau, les pays baltes ont compris que la Russie n'était pas aussi forte militairement qu'ils le pensaient, mais c'est surtout au cours des premiers mois de l'invasion que les craintes que la Russie n'étende la guerre à l'Europe de l'Est et aux pays baltes ont été les plus vives. La conviction que Poutine, dont on pensait qu'il s'était éloigné de l'approche classique et froide de la politique étrangère après la pandémie, était imprévisible, a également poussé ces pays à rechercher beaucoup plus rapidement un parapluie de sécurité de l'OTAN.
Le fait que la Finlande et la Suède aient modifié leur concept de sécurité et abandonné leur position de neutralité dans le contexte de la guerre en Ukraine est historique à tous égards. Leurs capacités militaires devraient également renforcer l'OTAN. Cependant, la Türkiye est depuis longtemps profondément troublée par le soutien direct et indirect de nombreux pays de l'OTAN aux YPG, l'organisation syrienne du PKK. La Türkiye, qui a soulevé cette question à plusieurs reprises lors des derniers sommets de l'OTAN, tant dans le contexte de la Syrie que dans celui de la lutte contre le terrorisme international, a fait de son mieux pour limiter et mettre fin au soutien des États-Unis et de certains alliés au YPG.
La Türkiye soutient que la lutte contre le terrorisme devrait être l'un des principaux points de l'ordre du jour de l'alliance de l'OTAN, mais cette question semble avoir été ignorée lors de l'adhésion de la Finlande et de la Suède. Contrairement à la Finlande, qui s'est empressée de satisfaire aux exigences de l'accord trilatéral signé par la Türkiye, la Finlande et la Suède, la Suède a été plus lente à agir. Cela signifie que la Suède ne veut pas se précipiter pour répondre aux préoccupations de la Türkiye en matière de sécurité et tente de montrer qu'elle "ne compromet pas ses valeurs démocratiques". Dans le même temps, certains, du côté suédois, pensent que la pression exercée par les pays de l'alliance de l'OTAN et le Congrès américain sur les F-16 portera ses fruits. Toutefois, les dernières déclarations du président Erdoğan suggèrent que la Türkiye ne sera pas pressée de prendre des mesures rapides à cet égard avant le sommet de Vilnius en juillet.
La Türkiye soutient la politique de la "porte ouverte" de l'OTAN et ne s'est pas opposée à l'adhésion de la Géorgie et de l'Ukraine dans le passé. Reconnaissant que l'élargissement de l'OTAN peut apporter une valeur stratégique, mais également préoccupée par les conflits régionaux, la Türkiye s'oppose à l'attitude de pays comme la Suède qui ignorent les préoccupations de sécurité nationale d'autres pays au nom de la protection des valeurs démocratiques. On sait que cette attitude n'est pas propre à la Suède et que des pays comme les États-Unis, l'Allemagne et la France sous-estiment aussi de temps à autre les préoccupations de la Türkiye en matière de terrorisme. Dans un contexte où l'OTAN tente de se renouveler au niveau mondial, les efforts de la Türkiye pour faire du terrorisme l'un des principaux points de l'ordre du jour constituent une politique parfaitement légitime et raisonnable. Ceux qui souhaitent que la Suède rejoigne l'alliance dès que possible devraient prendre au sérieux les préoccupations de la Türkiye concernant le financement et la propagande terroristes.
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