La Chine, qui fait de l'Afrique un pilier de sa diplomatie, a renforcé ses liens avec le continent et investit annuellement plusieurs milliards de dollars depuis 2015 dans des infrastructures (routes, chemins de fer, ports) ou des parcs industriels.
Le Forum sur la coopération sino-africaine (Focac) se tient tous les trois ans et à tour de rôle en Chine et en Afrique. Le dernier l'avait été au Sénégal en 2021.
Des dizaines de délégations et de nombreux chefs d'Etat et de gouvernement sont attendus à Pékin jusqu'à vendredi.
Les présidents de l'Afrique du Sud, du Nigeria et du Kenya ont notamment confirmé leur présence à ce rendez-vous diplomatique, le plus important organisé en Chine depuis la pandémie de Covid-19, selon Pékin.
L'eSwatini (ex-Swaziland) est le seul des 54 pays africains à manquer à l'appel, en raison de ses liens diplomatiques avec Taïwan que Pékin considère comme une partie de son territoire.
Le forum doit s'accompagner d'une série de contrats signés entre la Chine et ses partenaires.
"Les pays africains sont à un stade où ils veulent renforcer leurs relations avec la Chine dans nombre de domaines",
déclare l'analyste Ovigwe Eguegu de Development Reimagined, spécialisé dans la coopération Chine-Afrique.
"Ils cherchent des opportunités en matière de croissance, de développement économique et d'infrastructures",
souligne l'expert.
Le géant asiatique est le premier partenaire commercial de l'Afrique, avec 167,8 milliards de dollars de biens et services échangés au premier semestre après un montant record en 2023, selon les médias d'Etat chinois.
En outre, les prêts chinois accordés au continent étaient l'an dernier à leur plus haut niveau depuis cinq ans. L'Angola, l'Ethiopie, l'Egypte, le Nigeria et le Kenya en sont les principaux destinataires.
Mais selon les analystes, le ralentissement économique en Chine rend Pékin plus frileux à prêter d'importantes sommes et plus sélectif dans les projets.
Depuis le dernier Forum organisé en Chine il y a six ans,
"le monde a beaucoup changé avec notamment la pandémie de Covid, des tensions géopolitiques et désormais des difficultés économiques",
déclare Tang Xiaoyang, professeur à la prestigieuse université Tsinghua à Pékin.
Dans ce contexte, le
de prêts massifs à l'Afrique pour y construire à tout-va des infrastructures n'est
"tout simplement plus réalisable",
estime M. Tang.
Pékin fournit une aide aux pays africains depuis l'époque des guerres d'indépendance contre les ex-colonisateurs occidentaux.
Mais sa présence sur le continent s'est renforcée à mesure de la spectaculaire envolée de la Chine, devenue deuxième économie mondiale.
L'Afrique est au coeur des
"Nouvelles routes de la soie",
cette initiative lancée par Pékin en 2013 qui vise à développer la connectivité commerciale de la Chine avec le reste du monde et à sécuriser ses approvisionnements.
Chemin de fer au Kenya, exploitation minière en Tanzanie ou encore centrales hydroélectriques en République démocratique du Congo: une multitude de projets et des milliards de dollars de prêts et d'investissements ont vu le jour en Afrique.
Les analystes s'attendent durant le Forum à ce que les dirigeants africains courtisent la Chine pour obtenir davantage d'investissements mais aussi des "prêts plus favorables".
"Certains de ces prêts sont devenus un lourd fardeau pour leurs bénéficiaires",
affirme Alex Vines, analyste au centre de réflexion britannique Chatham House. Et de citer l'exemple du Kenya, récemment secoué par des troubles qui ont fait au moins 50 morts.
Ils ont été provoqués par la décision du gouvernement d'augmenter des taxes pour
"assurer sa dette envers ses créanciers internationaux, dont la Chine"
, selon M. Vines.
Ces prêts sont largement sollicités par les pays africains qui espèrent accélérer leur développement économique.
Les dirigeants chinois insistent eux volontiers sur le caractère
de la coopération.
"Nous sommes simplement des partenaires du développement (africain). Mais on en bénéficie également",
résume Tang Xiaoyang, de l'université Tsinghua.
L'Afrique, riche en ressources naturelles, est au coeur de la rivalité entre Pékin et Washington.
En 2022, la Maison Blanche avait accusé Pékin de considérer l'Afrique comme
"une arène importante pour défier l'ordre international".
La Chine a ouvert en Afrique sa toute première base militaire à l'étranger à Djibouti. Une seconde serait à l'étude, d'après des analystes.