La Türkiye participera pour la première fois en 13 ans à la réunion du Conseil des ministres des Affaires étrangères de la Ligue arabe, suite à une invitation de l'organisation, selon des sources diplomatiques.
Des experts estiment que l'invitation de la Türkiye est le résultat des efforts de normalisation menés par le président Recep Tayyip Erdogan. Fidan a joué un rôle clé dans ces processus diplomatiques à huis clos pendant son mandat à la tête du renseignement turc, renforçant les liens avec les pays du Golfe.
Les experts soulignent également que convaincre l'Irak de coopérer contre le groupe terroriste PKK a été un processus sur lequel Fidan a travaillé pendant des années sous la direction d'Erdogan.
Cette invitation de la Türkiye à la table de la Ligue arabe survient en plein génocide palestinien à Gaza. Un contexte durant lequel la Türkiye, qui s'est joint à la plainte sudafricaine déposée auprès de la Cour internationale de justice, s'est démarquée en interdisant le commerce avec Israël et en appelant à l'unité du monde musulman.
La brutalité israélienne à Gaza a causé la mort de plus de 40 000 Palestiniens en onze mois. La communauté internationale semble passive, voire complice, face à cette violence. Cependant, nous écrivions récemment qu'une action concertée des pays musulmans pourrait mettre fin à cette brutalité rapidement.
Une telle décision, soutenue par les 57 membres de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), pourrait interrompre le commerce israélien et affaiblir son économie. De plus, les pays musulmans pourraient fermer leur espace aérien aux vols israéliens, isolant ainsi Israël et limitant son accès aux munitions et fournitures nécessaires.
L’impact de telles mesures pourrait être significatif, comme l’a montré l’effet des blocages imposés par les Houthis au Yémen, qui ont réduit le commerce à travers le canal de Suez de 85 %. L’Égypte et l’Arabie Saoudite, par leur position stratégique en mer Rouge, jouent un rôle crucial et pourraient renforcer la pression sur Israël.
La Türkiye a déjà pris des mesures en suspendant tout commerce avec Israël depuis mai 2024, servant de modèle pour d’autres pays musulmans. La solidarité et la coopération entre les nations islamiques pourraient être la clé pour mettre fin au génocide à Gaza et instaurer un cessez-le-feu.
De plus, un sondage mené par le Centre arabe de Washington DC (ACW) en coopération avec le Centre arabe de recherche et d'études politiques (ACRPS), démontre que l'opinion publique arabe est fortement opposée à toute normalisation avec Israël. En effet, 89 % des personnes interrogées dans 16 pays arabes sont soit carrément hostiles, soit profondément sceptiques quant à la normalisation des relations avec Israël.
Les sources soulignent que de nombreux sujets à l'ordre du jour de la Ligue arabe, en particulier la Palestine, figurent parmi les priorités de la politique étrangère de la Türkiye.
Notant que les relations récemment approfondies et diversifiées de la Türkiye avec les pays arabes offrent de nouvelles opportunités pour résoudre les problèmes régionaux existants et établir des collaborations orientées vers l'avenir basées sur des bénéfices mutuels, les sources ont déclaré que le renforcement des relations institutionnelles et de la coordination avec la Ligue arabe est actuellement à l'ordre du jour.
Les sources ont également mentionné que l'invitation de Fidan reflète le développement des relations bilatérales avec les États membres ainsi que l'intérêt croissant pour le rôle de la Türkiye dans la région.
Ces derniers mois, Fidan a engagé des discussions avec des responsables de la Ligue arabe pour renforcer les liens. Il a rencontré le Secrétaire général de la Ligue arabe, Ahmed Aboul Gheit, lors d'une visite au Caire en octobre 2023.
Le 28 février, des consultations politiques se sont tenues à Ankara, sous la présidence de l'ancien vice-ministre des Affaires étrangères, l'ambassadeur Ahmet Yildiz, et du secrétaire général adjoint de la Ligue arabe, l'ambassadeur Hossam Zaki. Zaki a également assisté au Forum de la diplomatie d'Antalya.
L'ancien ministre turc des Affaires étrangères Abdullah Gul a assisté à la réunion de la Ligue arabe au Caire en 2007, tandis que l'ancien ministre des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu a celle de 2010. Le président Erdogan, alors Premier ministre, a prononcé un discours lors de la session d'ouverture de la réunion de la Ligue arabe de septembre 2011. Ces réunions se tiennent deux fois par an, en mars et en septembre, au Caire.
La Türkiye a également été invitée à la réunion informelle des ministres des Affaires étrangères de l'UE à Bruxelles en août, marquant son retour au forum après cinq ans. La Türkiye a parallèlement déposé sa demande d'adhésion aux BRICS, un évènement majeur dans sa volonté d'établir une diplomatie multipolaire à sa hauteur.