Le 25 juin 2023, le centre de Nairobi a été le théâtre d’une flambée de violence. Manifestants et forces de l’ordre s’affrontaient alors que le parlement kényan était brièvement pris d’assaut. La riposte policière fut brutale, marquée par des tirs à balles réelles et une répression sans précédent.
Parmi les victimes, John, 32 ans, se souvient de cet épisode avec effroi. Quelques jours après les manifestations, cet habitant du bidonville de Kibera a été enlevé par deux hommes armés, qu’il identifie comme des policiers.
Manifestations réprimées dans le sang
Les manifestations avaient commencé début juin, en opposition au projet de budget du gouvernement prévoyant des hausses d’impôts et de nouvelles taxes. Le mouvement, d’abord pacifique, a basculé dans la violence, laissant un lourd bilan : au moins 60 morts selon l’ONG Commission nationale kényane des droits de l’homme (KNCHR).
Faith, sa cousine, raconte:
Il ne s’intéressait pas à la politique. Il était juste au mauvais endroit au mauvais moment.
La famille, sans nouvelles, a épuisé toutes les pistes, des hôpitaux aux morgues, sans succès.
Des ravisseurs impunis
Des ONG, dont Amnesty International et Human Rights Watch, accusent les forces de sécurité kényanes d’être derrière ces enlèvements. Ces organisations citent des témoignages décrivant des victimes arrêtées par des policiers en civil, avant d’être retrouvées mortes quelques jours plus tard.
Un climat de peur généralisé
Les manifestations de juin et juillet ont marqué un tournant pour les jeunes générations, qui s’étaient mobilisées spontanément via les réseaux sociaux. Exaspérées par la pauvreté, le chômage et la corruption, elles espéraient un changement.
Aujourd’hui, beaucoup, comme John, ont renoncé à exprimer leur colère :
Au Kenya, vous n’en avez pas le droit.
Ce climat de peur, alimenté par des pratiques extrajudiciaires et une impunité généralisée, pèse sur un pays en quête de justice et de réformes.